Lana Del Rey, de la passion à la désillusion ?

PHÉNOMÈNE

Toute la hype autour de Lana Del Rey a commencé par là : un clip nostalgique, une douce mélodie, une voix agréable, une allure vintage façon star hollywoodienne des années 1950, et tout le phénomène s'est emballé pour ne plus jamais retomber. Lana Del Rey, nouvelle icône populaire et véritable machine à buzz médiatique, venait de naître et d'envoûter des millions de personnes à travers le monde. Et alors même que la presse internationale commençait déjà à s'emparer du sujet, la nouvelle idole de youtube mettait en ligne Blue jeans, nouveau tire avec un clip également dit fait-maison. On y découvrait alors plus en détail celle qui se présentait comme une Gangsta Nancy Sinatra à l'univers lynchien.

Tel un coup de foudre, Lana Del Rey attise les passions dès le début. Une fulgurance imprévue, une ascension aussi impressionnante que redoutable, et elle ne tardera pas à le savoir. Car si la jeune femme de vingt cinq ans a déjà séduit les oreilles et les coeurs de nombreux fans (et même de David Cameron), elle va en connaître les revers. Ne serait-ce que dans la presse française, la même interrogation revient en boucle, dûe dans un premier temps à un physique et une allure qui peuvent en effrayer quelque uns (voir sur la  Blogothèque) et faire d'elle la nouvelle joueuse de flûte dont l'envoûtement nous aveuglerait tous. Pas sûr qu'afficher ses cuisses à la télévision française lui ait d'ailleurs beaucoup servi.

Les lèvres de l'artiste alors, parlons-en. Outre qu'elles font énormément débat quant à leur manque de naturel, elles deviennent vite une sorte d'emblème de ce physique trop surfait qui pourrait remettre en cause l'authenticité de Lana Del Rey. Ses lèvres sont alors tantôt parodiées, tantôt reprises dans des titres d'articles (Chez Slate par exemple) et entretiennent autour de la jeune-femme une sorte d'aura indescriptible. Dès lors, les places pour ses rares concerts programmés s'arrachent à une vitesse folle, comme celui à Paris qui avait suscité des réactions diverses (résumé à lire sur Madmoizelle). Car oui, Lana est surtout un mystère incompréhensible, une femme farouche que chacun cherche au début à résoudre, ne comprenant pas l'alliance improbable de deux univers. De par son mystère est ainsi née la médiatisation excessive de cette demoiselle à l'allure frêle et la parole si douce (voir l'interview chez FaceCulture ou aux Q Awards de 2011, ou encore ici ou ) devenue sous la plume de certains une poupée pré-fabriquée par des producteurs, avec l'avalanche de botox, faux cils et faux ongles qui s'en suit.


Alors que les coups de coeur et critiques continuent de fleurir de par le monde, la jeune demoiselle annonce enfin son album en décembre en sortant un clip aussi grandiloquent que la démesure qui entoure son phénomène. Un clip posé et définitivement très classe qui prend comme décors le château de Fontainebleau. Il s'agit là de sa première grande vidéo et les moyens ne manquent de toute évidence pas, de quoi découvrir Lana sous un autre jour que dans des clips fauchés.

Ainsi, alors que les Inrocks s'interrogent déjà sur son statut d'icône, que Fluctuat leur enjambe le pas en évoquant une icône 2.0 du fait qu'elle parvienne à entretenir l'ambiguité autour d'elle via le web et les réseaux sociaux, Lana va rencontrer ses premiers échecs. On gardera par exemple en tête son premier live à la télévision américaine au SNL, plus ou moins catastrophique. Sa voix, si enchanteresse, se montre alors extrêmement maladroite et irrégulière. Pire encore, celle dont on disait qu'elle avait l'air d'une biche plantée sur un plateau lors d'un tout premier live, tente cette fois malhabilement des pirouettes gestuelles, se caressant tantôt les cheveux, tantôt s'accrochant au micro comme à la vie. Du pain béni pour ceux qui n'attendaient qu'à mettre au buché et à dénoncer l'imposture de cette ensorceleuse. Le Huffington Post ne s'y trompe alors pas en titrant "Lana Del Rey, bûcher ou piédestal ?". Celle dont on a voulu faire une nouvelle diva pop et révélation musicale de l'année se retrouve vite dépassée par un battage médiatique pharamineux, sans en avoir les épaules pour le supporter.

Tout ceci sans oublier également l'accusation de plagiat qui plane sur Video Games qui rappellerait un poil trop une chanson grecque. Évoquons aussi le cas Lizzy Grant, nom sous lequel elle avait sorti un premier album, sans grand succès, mais dont la rumeur court qu'il pourrait ressortir cette année (à écouter sur la page d'un internaute). Elle chantait déjà sur scène mais présentait un physique tout différent, peut-être moins attrayant (et encore), mais plus naturel, et surtout, avouons-le : méconnaissable par rapport à celui actuel, de quoi raviver les thèses du produit marketing et de quoi susciter encore des interrogations interminables. Interrogations qui font que les mélomanes eux-mêmes ne savent plus où se positionner, certains adorent, certains détestent... Le talent de la demoiselle ne semble pas indéniable pour tout le monde. Et l'album Born to die qui sort enfin n'assure pas la promesse d'authenticité tant attendue de l'artiste, mais lui promet toutefois une longue ascension graphiquement mesurée par NME. Born to be alive alors ?

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CRITIQUES DE L'ALBUM

Preview générale 


PLUTÔT POUR (non-spécialiste)

L'album, produit par Interscope (Label derrière Lady Gaga, M.I.A., les Black Eyed Peas et consorts) présente de réelles surprises en plus des titres déjà connus. Démarrons avec l'excellent Born To Die dans lequel on retrouve cette langueur monotone et ce côté mélancolique trop sérieux qui seront assez présent au fil des pistes.

Vient ensuite Off The Races, assez ennuyeux au début mais qui rappelle d'autres titres de la chanteuse au style old-school (comme Kinda Outta luck) et qui finit par emporter l'adhésion. Arrivent alors ses deux illustres titres, Video Games, produit tout en douceur, laissant libre place à la voix de la chanteuse pour nous envoûter durant trois minutes, malgré des paroles nasillardes ("It's you, it's you, it's all for you"). Le même genre de paroles tout aussi creux qu'on retrouve dans le très rythmé Blue Jeans, titre où Lana va d'ailleurs crescendo en puissance vers une fin qui se montre efficace en live. Deux très bons titres.

Jusque là tout va bien, puis arrive l'une des plus mauvaises chansons de l'album à mon goût, Diet Mtn Dew, bavard au possible, et ce pour cracher des paroles toujours affligeantes ("Do you think we will be in love forever"), une horreur. Mais même celle-là parvient à rester un minimum entraînante et à se laisser écouter, merci les beats incessants qui donnent un semblant de rythme et d'intérêt à cette chanson.

Passée cette pause contraignante se présente alors à nous un trio de gros tubes en devenir : National Anthem, Dark Paradise Radio. Le premier éclate tel un feu d'artifice dès le début, avant de s'imposer à gros coup de caissons. Un titre hip-hop sacrifiant en revanche trop la voix de son interprète qui surjoue la hype pour se déclarer hymne national, rien que ça. Original. Mieux encore, Dark Paradise qui illumine dès la première seconde de chant, mais qui, à l'instar d'un Vidéo Games, est martelé par des beats qui créent un trop grand fracas, gâchant un brin le résultat final. C'est alors au tour de l'excellent Radio de passer dans nos oreilles, rare titre totalement enjoué et réussi de Lana. Entraînant du début à la fin, la chanson s'auto-proclame tube multi-diffusé sur les ondes de par son efficacité mais aussi ses paroles ("Baby love me cause i'm playing on the radio"). Un véritable plaisir pour les oreilles, agréable, mais une nouvelle fois beaucoup trop bruyant par endroits, et avec une fin trop abrupte qui ne laisse aucune place à la musique.


Soyons clairs, la seconde partie de l'album est beaucoup moins intéressante. Carmen est sans âme, et la partie chantée en français ne parvient pas à relever l'intérêt d'une chanson trop fade et quelconque. Salutations à Bizet tout de même, pas sûr qu'il appréciera l'hommage. Million dollar man, lancinante, n'est pas spécialement ce que je préfère, mais possède ce style très Lizzy Grant de ses débuts. Enfin, Summertime sadness, titre plutôt sympathique, surtout dans son moment calme à l'approche du dernier refrain.

La dernière partie de l'album, toujours plus inégale, commence par le gâchis This is what make us girls au ralenti à peine caché et qui ne fonctionne plus du tout dans cet état, surtout qu'elle est surplombée d'une rythmique bourrine qui lasse vite. La demoiselle se retrouve à chanter de plaisants couplets sur un insoutenable hachage de bruits... Et dire que l'album simple se termine là dessus, triste.

Heureusement (encore que...) il reste trois bonus tracks dans l'édition deluxe. Without you finit de nous épuiser, rien de nouveau et on est déjà bien las. Restent des refrains joviaux et qui s'écoutent sans déplaisir, et surtout, comme avec Blue Jeans, une chanson qui monte un brin en puissance vers la fin. Place alors au titre Lolita et son début qui ne donne pas du tout envie de continuer... ça tombe bien, le reste non plus, flop donc pour ce titre trop orienté hip-hop. Le dernier titre Lucky Ones commence subitement, ça sent le fait à la va-vite pour cette fin d'album. Une musique très gentillette à l'ambiance enfantine, pourquoi pas...

C'est fini, et je trouve cet album réjouissant. Malgré les apparences et cette deuxième partie très décevante, Lana Del Rey nous offre quand même sur un plateau pas moins de 6 tubes très bons voire géniaux sur 15 chansons au total, un résultat fort convenable. Ni le chef d'oeuvre annoncé, ni la daube attendue. La production et les arrangements trop bruyants ont simplement égaré sur le passage la puissance des titres de Lana Del Rey qui, n'en doutons pas, n'a pas fini de faire parler d'elle. Alors, artiste ou marketing ? Disons le juste milieu qui va lui permettre de plaire à un public très large, tout en restant paisiblement éloigné des mastodontes commerciaux qui seraient d'ailleurs tout bonnement incapables d'arriver à la cheville ne serait-ce que d'un des tubes de Lana Del Rey. Un ultime regret à prendre en compte néanmoins, celui du manque de Kinda outta luck et Driving in cars with boys sur l'album, tous deux excellents. 


MITIGÉ (spécialiste)
GWENDAL Perrin, journaliste mélomane, blog, twitter

Que vaut vraiment la coqueluche sur la longueur, ce que soit en termes de mélodies, de beats, de paroles, de cohérence d'ensemble ? Passage en revue. 

1. Born To Die : le beat est intéressant, rappelle les meilleures productions de jj genre "Can't Stop". Le titre est assez charmant quoique fort conventionnel. En effet, rajouter des cordes pour faire plus "cinématographique" est le procédé le plus facile (et pompeux) de la musique actuelle mais, sur l'ensemble de la galette, il n'est pas trop mal utilisé - quoiqu'à outrance.

2. Off To The Races : est-elle la seule à chanter ? Quelques doutes apparaissent au début de cette chanson au rythme un chouia plus enlevé que "Born To Die" mais surtout, avec plusieurs timbres de voix : Lana maîtrise donc plus d'une octave, ce dont on a un moment douté aux premières écoutes de "Video Games" (moment de mauvaise foi). Problème : le beat semble tout droit piqué d'une face B de Rihanna, certes souvent moins mauvaise que la face A mais qui sent tout de même le réchauffé. Dommage car (c'est mon côté classique qui parle) on sent d'intéressantes possibilités mélodiques avec ce que donne la conclusion 100% violons. Le titre se laisse écouter mais oublier assez rapidement (par contre il y a probablement de quoi en pondre d'excellents remixes).

3. Blue Jeans : retour à un rythme plus tranquille mais bien que ce titre était déjà sorti sur les ondes, à ce niveau de l'album, il a déjà des allures de répétition. Utiliser la même formule lasse déjà au bout de trois titres ? Il va falloir s'accrocher.

4. Video Games : LE titre, donc. C'est cette déclaration d'amour aux geeks qui a fait passer Lizzy Scott au statut d'icône involontaire. Il est indéniable qu'il a un potentiel tubesque assez puissant qui n'a pas manqué de ressortir : mélodie et orchestration sorties d'une bande originale de film Disney se mélangent avec la voix sans grésillements de Lana Del Rey. Ce titre contient probablement en soi l'explication du retour de bâton qu'a suivi la demoiselle ces dernières semaines : "Video Games", première chanson sortie sous sa nouvelle identité, est la meilleure piste de l'album. Donc le reste est moins bon. Ce qui est gênant pour une réputation...

5. Diet Mtn Dew : là encore, le beat rappelle Rihanna ou Beyoncé et le phrasé (pourtant aux accents hip-hop) de Lana Del Rey s'affadit immédiatement. Dommage pour elle que son timbre de voix ne lui permette pas (pour l'heure ?) de s'adapter à d'autres atmosphères que celles de "Video Games" ou "Blue Jeans"... La connivence lynchienne qu'on lui a souvent prêté parait dès lors bien lointaine.

6. National Anthem : Lana joue encore à la "Bad Bad Girl" pour passer à la radio comme toutes ses petites copines (plus à l'aise sur scène suis-je tenté de rajouter). Ne t'inquiète pas, tu vas y parvenir avec ce titre tellement calibré pour les ondes commerciales que cela en devient presque gênant pour elle de se voir annoncer sur NRJ entre une production de Pascal Obispo et Christophe Maé.

7. Dark Paradise : il fallait bien que cela arrive un jour ou l'autre : après le rap/RnB, les premiers éléments dubstep arrivent sur ce titre. Le beat lent du titre rend cette arrivée plus discrète mais ajoutez à cela Lana qui plane dans le monde des aigus et des cordes qui, pour le coup, sont trop présentes et donnent l'impression de nager dans des nuages de chantilly, et vous obtiendrez l'une des pistes les plus désagréables de l'ensemble.


8. Radio : ce titre est une sorte de compromis entre les deux tendances récurrentes de l'album, d'un côté plaire aux radios (tiens donc) en rajoutant quelques beats faciles, de l'autre plaire aux hipsters et leurs pseudo-héritiers avec des jeux sur la voix, une mélodie planante et des paroles qui veulent "se la jouer" : "It's a fucking dream I'm living in, Baby/Because I'm playing on the radio", tiens donc. La synthèse prend à peu près sur ce titre qui se laisse écouter tranquillement, mais ce n'est pas toujours le cas...

9. Carmen : pendant les onze premières secondes, l'orchestration et la mélodie laissent espérer que Ryuichi Sakamoto a pris le contrôle du vaisseau. Mais seulement onze. Ce titre reproduit les mêmes schèmes que précédemment évoqués jusque là et n'apporte rien de plus. Dispensable, donc.

10. Million Dollar Man : malgré une surinvasion de aigus pas forcément judicieux, le titre recrée une atmosphère cinématographique perdue depuis quelques titres. Pas révolutionnaire pour un sou mais filmique sans aucun doute.

11. Summertime Sadness : Nous n'avançons pas. Le beat rihannesque, l'affadissement, la recherche de compromis (et non pas de fusions) constituent un bis repetita un peu lassant.

12. This Is What Makes Us Girls : la chanson plaira peut-être à "Osez Le Féminisme", mais elle n'en reste pas moins qu'une simple piste une nouvelle fois calibrée pour les radios. Doit-on comprendre que les producteurs de Lana veulent, à l'instar d'une certaine Lady GaGa, sortir au minimum 5 singles de cet album ?

13. Without You (bonus) : pas mieux. (Oui, c'est tout)

14. Lolita (bonus) : fichtre, Lana retombe du mauvais côté de la force. Le retour des beats pseudo-dubstep, les effets pitchés à gogo et revoilà Rihanna Del Rey au comptoir.

15. Lucky Ones (bonus) : si la version "normale" de l'album comprenait ces trois titres bonus, il y aurait une boucle entre son introduction et sa conclusion : l'avalanche de cordes, la recherche de singularité stylistique, la voix qui va percher quelques aigus... Nous ne sommes pas chez Disney mais il n'est pas dit qu'ils ne récupèrent pas la musique pour une de leurs publicités.

L'album a donc des allures de confirmation universelle : ceux qui hallucinaient sur "Video Games" et avaient encadré la une des "Inrocks" à son sujet risquent d'exploser leurs compteurs Last.fm à force de passer "Born To Die" en boucle. Les autres se diviseront en deux catégories : les allergiques de nature à la pop et qui rejetteront par réflexe cette musique un peu éthérée, parfois peu conventionnelle mais trop souvent calibrée. Et puis les derniers, dans lesquels je me classe, qui reconnaîtront quelques trouvailles intéressantes dans les mélodies, les beats, les atmosphères mais qui n'accorderont pas plus d'importance à cet opus qu'à des dizaines d'autres d'un niveau équivalent - et, corollaire, se concentreront sur des concepts plus originaux et plus réussis. Mais qui se vendront moins, forcément.


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Commentaires

  1. Si j'ai bien compris, un très bon article pour dire que cet album est bon sans être exceptionnel ? C'est que le buzz a bien fonctionné...

    Sur le fond, est-ce qu'opposer "artiste" et "produit marketing" est encore pertinent de nos jours, quand on parle d'artistes produits par les Majors américains ?

    Et enfin, c'est dommage qu'on ne trouve dans cet article aucune information concrète sur la production de l'album : on parle de "produit marketing" sans jamais savoir de quoi on parle exactement. Rappeler qu'il est issu du label Interscope, qui produit, entre autres, Gwen Stefani et Lady Gaga serait déjà un bon début pour resituer l'album dans son contexte. Toute critique devrait commencer par une analyse des conditions de production...

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  2. C'est vrai, petit oubli de notre part quant au label (corrigé maintenant, merci !), mais même avec ça, difficile de la situer avec ce seul album. Elle reste très très éloignée d'une Lady Gaga à mes yeux. Peut-être que la maison de disque a juste repéré une nouvelle poule aux oeufs d'or et a orienté son album vers quelque chose de plus calibré pour les charts, à mon grand désarroi si c'est le cas d'ailleurs. Ou alors Lana a choisi de mettre les petits plats dans les grands en sachant qu'ils auraient les moyens de la mettre en avant, reste quelque chose qui cloque avec tout ça.

    Sinon, oui, le buzz fonctionne tellement que chacun y met de son grain de sel quant au phénomène Lana Del Rey, et cet article compris, je ne dis pas le contraire :-) Mais ayant découvert le phénomène seulement ce mois-ci, j'avais vraiment envie d'écrire là dessus.

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